Le décryptage
Le projet de loi prévoit d’harmoniser le temps de travail dans la fonction publique en mettant fin dans la Fonction publique territoriale aux régimes dérogatoires mis en place dans certaines collectivités et leurs établissements publics.
Celles-ci disposeront d’un délai d’un an à compter du prochain renouvellement de leurs assemblées délibérantes pour définir, dans les conditions fixées à l’art. 7-1 de la loi du 84-53, les règles relatives au temps de travail de leurs agents, soit :
– au plus tard en mars 2021 pour le bloc communal ;
– en mars 2022 pour les départements et en décembre 2022 pour les régions.
La CGT rappelle que dans la Fonction publique territoriale, ce sont des négociations locales qui ont permis de gagner des avancées, justifiées par l’organisation du service, la pénibilité ou la volonté politique de créer des emplois publics statutaires supplémentaires en réduisant le temps de travail mais en conservant les rémunérations.
Ainsi dans certaines collectivités, le temps de travail est à 32h/semaine, voire 30 heures ! Ces conquêtes sociales sont justes et nécessaires. Autrement dit, si la loi passe, tous les accords locaux seront mis à la poubelle !
Le contenu du projet de loi
Article 18
I. – Les collectivités territoriales et les établissements publics mentionnés au premier alinéa de l’article 2 de la loi du 26 janvier 1984 précitée, ayant maintenu un régime de travail mis en place antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l’emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu’au temps de travail dans la fonction publique territoriale, disposent d’un délai d’un an à compter du renouvellement général de leurs assemblées délibérantes pour définir, dans les conditions fixées à l’article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 précitée, les règles relatives au temps de travail de leurs agents.
II. – Le dernier alinéa de l’article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 précitée est abrogé à l’échéance du délai prévu au I du présent article.
III. – Au deuxième alinéa de l’article 136 de la même loi, les mots : « des articles 9, 10 » sont remplacés par les mots : « des articles 7-1, 9, 10 ».
L'exposé de motifs
L’article 18 permet une harmonisation de la durée du travail dans la fonction publique territoriale en supprimant les régimes dérogatoires à la durée légale du travail (1 607 heures) antérieurs à la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l’emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu’au temps de travail dans la fonction publique territoriale. Ne sont pas concernés par cette évolution les régimes de travail établis pour tenir compte des sujétions spécifiques auxquelles sont soumis certains agents publics (travail de nuit, le dimanche, les jours fériés, travail pénible ou dangereux, etc.). L’abrogation du fondement législatif des régimes dérogatoires imposera aux collectivités concernées la redéfinition, par délibération et dans le respect du dialogue social local, de nouveaux cycles de travail. Elles disposeront pour ce faire d’un délai d’un an à compter du renouvellement de chacune des assemblées délibérantes, soit au plus tard en mars 2021 pour le bloc communal, en mars 2022 pour les départements et en décembre 2022 pour les régions.
Les contre propositions et amendements possibles
AMENDEMENT N° 69
Texte de l’amendement :
Suppression de l’article 18
Exposé des motifs
Le Décret n°2000-815 du 25 août 2000 relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l’Etat et dans la magistrature, définit le temps de travail annuel comme suit : “Le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d’une durée annuelle de travail effectif de 1 607 heures maximum, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d’être effectuées.”
C’est sur cette base qu’est définit l’article 2 du Décret n°2001-623 du 12 juillet 2001 pris pour l’application de l’article 7-1 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale.
Article 7-1 remis en cause dans le projet de loi de transformation de la fonction publique dans son article 18.
Le temps de travail a déjà fait l’objet d’une attaque forte en 2016/2017, dans le cadre du rapport de la mission donnée à Philippe Laurent, président du CSFPT, sur l’état des lieux du temps de travail des agents publics dans les 3 versants de la fonction publique et par la circulaire ministérielle du 31 mars 2017 relative à l’application des règles en matière de temps de travail dans les trois versants de la fonction publique qui en a résulté. On peut y lire chapitre 1.1 – Les obligations annuelles de travail : “En application de la réglementation en vigueur, la durée de travail effectif est fixée à 35 heures par semaine et à 1 607 heures par an.”
Ce rappel réglementaire occulte déjà l’adjectif “maximum”, pourtant significatif, figurant dans le Décret du 25 août 2000.
1607 heures c’est un maximum d’heures à ne pas dépasser. Ce n’est pas un maximum à atteindre.
L’augmentation du temps de travail ne répond à aucun besoin propre au bon fonctionnement des services publics.
La réalité du terrain c’est : 27% des fonctionnaires travaillent la nuit contre 26 % des salariés du privé – 18 % travaillent le dimanche contre 15 % dans le privé – globalement, les astreintes sont deux fois plus importantes dans le secteur public.
L’augmentation du temps de travail est un moyen pour faire baisser le “coût” du travail, pour réduire le personnel de plus en plus considéré comme la variable d’ajustement des politiques d’austérité. L’incitation faite aux employeurs publics à innover, à expérimenter, à adapter les règles et normes aux particularités locales supposées reflète en fait le détricotage de tout le tissu des services publics républicains, la généralisation des délégations de services publics et l’ouverture au privé.
La réelle innovation est de définir le temps de travail à 32 heures par semaine. Cela permettrait de créer massivement des emplois dans les collectivités, de répondre aux besoins croissants des usagers, d’améliorer les conditions de travail des agents jugées de plus en plus pénibles.
La CGT revendique les 32 heures pour toutes et tous dès maintenant. C’est économiquement possible et c’est socialement nécessaire.
De plus, la loi n°2001-21 du 3 janvier 2001 tient compte du principe constitutionnel de la libre administration des collectivités territoriales puisqu’elle accorde à l’organe délibérant de la collectivité ou de l’établissement qu’il puisse organiser le temps de travail selon “la nature des missions et de la définition des cycles de travail qui en résultent”.
Abroger cet article revient à supprimer le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales alors que ce principe de rang constitutionnel s’impose au législateur et à toutes les autorités administratives.
AMENDEMENT N° 70
Texte de l’amendement
Dans le 14e de l’article L6143-7 du code de la santé publique après les termes « à défaut d’un accord » il est ajouté « après négociation. »
Exposé des motifs
Il s’agit de rendre obligatoire la négociation sur le temps de travail dans les établissements publics hospitaliers.