Vous voulez des CAP sans droit de regard sur les carrières ? (Article 4) - Projet de loi Fonction publique - On n'en veut pas !

Le détail

35 articles modifient 4 titres constituant le Statut général des fonctionnaires, ainsi que le Code de la santé publique, le Code de l’action sociale et le Code général des collectivités territoriales.

4 chapitres reprennent les orientations du gouvernement, et un 5ème est la traduction législative du protocole d’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (que la CGT n'a pas signé en raison de ses manques).

Un dernier article précise le calendrier d’application.

Vous voulez des CAP sans droit de regard sur les carrières ? (Article 4)

Rôle et compétence des CAP.

Le décryptage

Des CAP vidées de leurs prérogatives :

Le projet de loi recentre les attributions des CAP en les vidant d’une très grande partie de leurs compétences et prérogatives et en bafouant d’un revers de main le rôle essentiel de défense des dossiers mené par les représentants du personnel.

Le gouvernement prétend réorganiser les CAP pour un meilleur accompagnement des situations individuelles complexes. Il n’en est rien ! Pour mettre en œuvre le mérite individuel et la mobilité contrainte par les restructurations, les CAP sont un obstacle à la mise en œuvre de ses réformes.

L’avis des CAP sera supprimé sur les questions liées aux mutations, aux mobilités, à l’avancement et à la promotion interne. Tout est donc lié pour le gouvernement !

Ne subsisteront donc que les CAP relatives à la situation individuelle (recours, révision du compte-rendu d’évaluation) et à la discipline (cf. art. 15).

Des CAP par catégorie :

Le projet de loi prévoit également pour la FPE, des CAP par catégorie hiérarchique A, B et C et non plus par corps (ou grade dans certaines administrations), à l’instar de ce qui existe dans les deux autres versants.

Dans la FPT et la FPE, lorsque l’insuffisance des effectifs le justifient, il peut être créée une CAP commune à plusieurs catégories hiérarchiques.

Pour la CGT, les arguments évoqués sont éloquents : il faut « déconcentrer les décisions individuelles au plus près du terrain » et « doter les managers des leviers de ressources humaines nécessaires à leur action ». La traduction est claire : à l’heure des restructurations brutales, des fermetures de services, des abandons de missions publiques, il faut donner toutes les libertés aux employeurs d’en faire à leur guise !

Nous estimons au contraire que nous avons besoin de CAP avec un rôle et des prérogatives renforcés dans les trois versants, pour le droit des agents à être informés et défendus tout au long de la carrière par des élu.e.s disposant des moyens nécessaires. C’est une des conditions pour conforter les personnels dans une Fonction publique de carrière et dans leurs missions d’intérêt général.

Calendrier de mise en œuvre :

Ces dispositions entrent en vigueur pour les décisions individuelles prises au titre de l’année 2021.

Mais attention ! Par dérogation elles s’appliquent dans un calendrier différencié comme suit :

– la généralisation de l’évaluation professionnelle en lieu et place de la notation (cf. art. 10 du projet de loi) entre en vigueur au 1/1/2021 pour l’entretien professionnel conduit au titre de 2020 ;

– Dans les 3 versants, les décision individuelles et collectives relatives aux mutations et aux mobilités (précisées dans l’art. 11 du projet de loi pour la FPE) ne relèvent plus des CAP à compter du 1/1/2020 ;

– Dans la FPE, la composition de CAP par catégorie entre en vigueur au prochain renouvellement des instances en 2022 ;

– Dans la FPT, la mise en place de CAP communes à plusieurs catégories entre en vigueur au plus tard le 1/1/2021.

Le contenu du projet de loi

Attention, il s'agit là du texte du gouvernement.

Article 4

I. – Au quatrième alinéa de l’article 30 de la loi du 13 juillet 1983 précitée, les mots : « La commission administrative paritaire du » sont remplacés par les mots : « La commission administrative paritaire de chaque catégorie compétente pour le ».

II. – La loi du 11 janvier 1984 précitée est ainsi modifiée :

1° Au premier alinéa de l’article 13, les mots : « en matière d’avancement » sont supprimés ;

2° L’article 14 est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. 14. – Pour chacune des catégories A, B et C de fonctionnaires prévues à l’article 13 de la loi du 13 juillet 1983 précitée sont créées une ou plusieurs commissions administratives paritaires dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat. Toutefois, lorsque l’insuffisance des effectifs le justifie, il peut être créé une commission administrative paritaire unique pour plusieurs catégories hiérarchiques.

« La commission administrative paritaire comprend en nombre égal des représentants de l’administration et des représentants du personnel élus.

« Les représentants du personnel sont élus dans les conditions définies à l’article 9 bis
de la loi du 13 juillet 1983 précitée.

« Les fonctionnaires d’une catégorie examinent les questions relatives à la situation individuelle et à la discipline des fonctionnaires relevant de la même catégorie, sans distinction de corps et de grade.

« La commission administrative paritaire examine les décisions individuelles mentionnées aux articles 51, 55, 67 et 70, ainsi que celles déterminées par décret en Conseil d’Etat. » ;

3° Après l’article 14, il est inséré un article 14 bis ainsi rédigé :

« Art.14 bis. – Les agents peuvent choisir un représentant désigné par l’organisation syndicale représentative de leur choix pour les assister dans l’exercice des recours administratifs contre les décisions individuelles défavorables prises au titre des articles 26, 58 et 60. »

III. – La loi du 26 janvier 1984 précitée est ainsi modifiée : 1° L’article 28 est ainsi modifié :
a) Après le premier alinéa, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés :

« Par dérogation à l’alinéa précédent, lorsque l’insuffisance des effectifs le justifie, il peut être créé une commission administrative paritaire unique pour plusieurs catégories hiérarchiques.

« Les fonctionnaires d’une catégorie examinent les questions relatives à la situation individuelle et à la discipline des fonctionnaires relevant de la même catégorie, sans distinction de cadre d’emplois et de grade. » ;

b) Au troisième alinéa, qui devient le cinquième, les mots : « de ses communes membres et de leurs établissements publics » sont remplacés par les mots : « des communes membres ou d’une partie d’entre elles, et des établissements publics qui leur sont rattachés » ;

2° L’article 30 est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. 30. – La commission administrative paritaire examine les décisions individuelles mentionnées aux articles 46, 60, 72, 76, 89, 93 et 96 ainsi que celles déterminées par décret en Conseil d’Etat.

« Les agents peuvent choisir un représentant désigné par l’organisation syndicale représentative de leur choix pour les assister dans l’exercice des recours administratifs contre les décisions individuelles défavorables prises au titre des articles 39, 52, 78-1 et 79. »

IV. – Les dispositions du code général des collectivités territoriales sont ainsi modifiées : 1° Le IV bis de l’article L. 5211-4-1 est ainsi modifié :
a) Au 1°, les mots : « après avis de la commission administrative paritaire compétente, » sont supprimés aux deux occurrences ;
b) Au 2°, les mots : « après avis, selon le cas, des commissions consultatives paritaires ou des commissions administratives paritaires compétentes » sont supprimés ;

2° Au quatrième alinéa de l’article L. 5211-4-2, les mots : « après avis, selon le cas, des commissions consultatives paritaires ou des commissions administratives paritaires compétentes » sont supprimés ;

3° Aux articles L. 5212-33, L. 5214-28 et L. 5216-9, les mots : « est soumise pour avis, aux commissions administratives paritaires compétentes. Elle » sont supprimés ;

4° Au III de l’article L. 5219-12, les mots : « après avis, selon le cas, de la commission administrative paritaire ou de la commission consultative paritaire compétente » sont supprimés.

V. – La loi du 9 janvier 1986 précitée est ainsi modifiée :

1° Au premier alinéa de l’article 14, les mots : « aux articles 68 et » sont remplacés par les mots : « à l’article » ;

2° L’article 20-1 est remplacé par les dispositions suivantes :

« Les fonctionnaires d’une catégorie examinent les questions relatives à la situation individuelle et à la discipline des fonctionnaires relevant de la même catégorie, sans distinction de corps, de grade et d’emploi. » ;

3° L’article 21 est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. 21. – I. – La commission administrative paritaire examine les décisions individuelles mentionnées aux articles 37, 50-1, 62, 65, 82 et 88 du présent titre ainsi que celles déterminées par décret en Conseil d’Etat.

« II. – Les agents peuvent choisir un représentant désigné par l’organisation syndicale représentative de leur choix pour les assister dans l’exercice des recours administratifs contre les décisions individuelles défavorables prises au titre des articles 35 et 69. » ;

4° Le quatrième alinéa de l’article 46 est supprimé ; 5° Le cinquième alinéa de l’article 87 est supprimé ; 6° L’article 119 est ainsi modifié :
a) Au cinquième alinéa, les mots : « des catégories C et D » sont remplacés par les mots : « de catégorie C » et les mots : « pour la catégorie C et à cinq ans pour la catégorie D » sont supprimés ;
b) Les sixième et septième alinéas sont supprimés.

L'exposé de motifs

Attention, il s'agit là du texte du gouvernement.

L’article 4 traite des questions relatives aux commissions administratives paritaires (CAP) dans les trois versants de la fonction publique dont il modifie substantiellement les règles. Il opère, d’abord, un recentrage des attributions de ces CAP. Il procède ensuite à l’harmonisation de leur architecture en les instituant par catégories (et non plus par corps) dans la fonction publique de l’Etat, sans exclure la possibilité de créer, par voie règlementaire, des CAP par grands univers au sein d’une même catégorie. Il met fin, ensuite, aux groupes hiérarchiques dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière en permettant que les fonctionnaires d’une catégorie puissent, sans distinction de corps, de cadres d’emplois, d’emploi et de grade, se prononcer sur la situation individuelle (y compris en matière disciplinaire) des fonctionnaires relevant de la même catégorie. Il prévoit, en outre, la possibilité de créer des CAP uniques pour plusieurs catégories dans les fonctions publiques d’Etat et territoriale en cas d’insuffisance d’effectifs.

Enfin, l’article tire la conséquence du recentrage des attributions des CAP en supprimant l’avis préalable de cette instance respectivement sur les questions liées aux mutations et aux mobilités dans la fonction publique d’Etat et sur les questions liées à l’avancement et la promotion dans les trois versants de la fonction publique. Cette mesure est essentielle pour déconcentrer les décisions individuelles au plus près du terrain et doter les managers des leviers de ressources humaines nécessaires à leur action, dans le respect des garanties individuelles des agents publics. En contrepartie de cette évolution, l’article prévoit d’une part la possibilité pour un agent de se faire accompagner par un représentant syndical désigné par une organisation syndicale représentative de son choix pour l’assister dans l’exercice de recours administratifs contre des décisions individuelles défavorables dans ces matières. D’autre part, des lignes directrices de gestion seront établies, après avis du nouveau comité social, pour garantir la transparence sur les orientations et les priorités en matière de mobilité, de promotion et de valorisation des parcours professionnels (cf. articles 11 et 14).

Les contre propositions et amendements possibles

AMENDEMENT N° 6

Texte de l’amendement :

Dans l’article 4, le I est supprimé

Exposé des motifs :

La loi du 13 juillet 1983 prévoit, à son article 13, que « les corps et cadres d’emplois de fonctionnaires sont répartis en 3 catégories désignées […] par les lettres A, B et C ».

A son article 30, dans sa rédaction actuelle, elle pose le principe, commun aux 3 versants de la Fonction publique, de l’existence d’une commission administrative paritaire pour chaque corps ou cadre d’emploi.

Sous des aspects techniques, la modification apportée à l’article 30 par le projet gouvernemental vise, de fait, à supprimer l’obligation actuelle de mise en place d’une CAP pour chaque corps et cadre d’emploi de la Fonction publique, ce qui est une atteinte grave au principe de participation des fonctionnaires.

La proposition d’amendement vise, quant à elle, à réaffirmer ce principe.

AMENDEMENT N° 7

Texte de l’amendement :

Dans l’article 4, les II, III, IV et V sont supprimés

Exposé des motifs :

Le projet du gouvernement vise à vider les commissions paritaires d’une grande partie de leur substance. En supprimant la consultation de ces instances en matière d’avancement et en renvoyant à des décrets en Conseil d’Etat, non connus à ce jour, la liste des décisions individuelles susceptibles d’être évoquées en CAP il remet gravement en cause le principe de participation des fonctionnaires et ouvre la porte à l’arbitraire.

Dans le même temps, en annonçant qu’il va rendre obligatoire le recours administratif préalable à l’engagement d’une contestation individuelle devant la juridiction administrative, le gouvernement rallonge les procédures déjà particulièrement complexes de recours contre les abus dont les agents peuvent être victimes.

L’amendement vise à maintenir les compétences actuelles des CAP qui constituent une garantie des droits des agents et, par voie de conséquence, pour tous les citoyens.

AMENDEMENT N°8

(Amendement de repli si l’amendement N° 7 n’est pas retenu)

Texte de l’amendement :

– Dans le III de l’article, le 2° est remplacé par :

« L’article 30 de la loi 84-53 est remplacé par les dispositions suivantes :

La Commission Administrative paritaire examineles décisions individuelles mentionnées à l’article 52 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et aux articles L 5211-4-1 et suivants du CGCT. Elles assortissent leur avis de préconisations à l’attention de l’employeur. »

– Suppression du IV

Exposé des motifs :

L’article 9 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires reconnaît le principe de participation des agents, par l’intermédiaire de leurs délégués siégeant dans des organismes consultatifs, à l’examen des décisions individuelles relatives à leur carrière.

L’article 52 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 dispose actuellement que l’autorité territoriale procède aux mouvements des fonctionnaires au sein de la collectivité ou de l’établissement ; seules les mutations comportant changement de résidence ou modification de la situation des intéressés sont soumises à l’avis des commissions administratives paritaires.

Le CGCT prévoit également que l’avis de la CAP est requis dans toute procédure de dissolution d’un syndicat, de transfert de compétences entre communes et établissements de coopération intercommunale (EPCI).

Pour les mutations internes, le projet de loi propose de remplacer cette saisine de la CAP par un « conseiller syndical » qui assisterait l’agent dans l’exercice de son recours administratif. L’expérience en CAP montre que les mutations internes nécessitent une approche et une réflexion collective des situations car elles sont souvent en lien avec des projets de réorganisations de services. Les échanges de points de vue avec le collège employeur sont indispensables.

    Je suis

    De la fonction publique

    Catégorie

    J'habite

    Je veux

    Des agents précaires et jetables, sous contrat de projet, sous pression statutaire et financière  ? Des directions issues du privé et dépendantes des politiques ? Des externalisations de services publics ? Des négociations collectives par ordonnances ? Des rémunérations à géométrie variable et la mise en concurrence des agents ? Des ruptures conventionnelles en masse ? Des affectations opaques et des mutations forcées ? Des inégalités dans les déroulés de carrière et les promotions ? La fin de l’égalité d’accès aux emplois par le concours ? L'harmonisation par le bas du temps de travail ? La suppression des CHSCT ? L’évaluation arbitraire, sans critères objectifs et transparents ?